
Yann Brugenn
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Dans une position
sage et apathique,
J'observe la défaite du jour qui flanche,
Guettant le deuil du soleil sceptique,
J'excave le profil de ma revanche.
Rageur, je déchire le ciel en parcelles,
Confettis dérisoires que j'éparpille
Sur ton visage invisible et rebelle
Qui cisèle ma mémoire peu labile.
Je couvre de bouts de tissus célestes
Tes moindres traits, déclics rétroactifs ;
Mes doigts aiguisés par des caresses modestes
Sur ton corps absent et persuasif
Se vengent.
Ils arrachent
les étoiles sans faire grâce,
Ces étoiles orphelines de dons et de talents,
Servantes dociles des dieux rapaces,
Griffonnaient les voies de ma vie d'antan.
Je lacère mon tracé sentimental
Collé sur un fond impur de texture bleue,
Cette esquisse imparfaite et fatale
Incrustée malgré moi dans les cieux.
J'accroche ma vue aux astres mercenaires,
Rescapés de mon aigreur inassouvie,
Pour profiler d'un coup d'oil éclair
Une destinée volontaire que j'élis
En échange...
Les éclats
de mes prunelles altières
Adhèrent aux restes de la voûte déchiquetée,
Ersatz bienfaisants des bijoux stellaires
Que protège ma hargne exacerbée.
D'un souffle dominateur de certitude,
Je les rive à vie à une place,
Alliés vainqueurs d'un destin trop rude,
Préludes au croquis que je me retrace.
Ils projettent sur cette terre honnie
Une ligne entraîneuse de mes désirs
Qui saisit dans un balayage infini
Une espérance asservie à me servir,
Maîtrisée.
Les regrets
lunatiques et grégaires
Se fondent dans un bout d'orage timide
Et se suicident dans un bref éclair
Tiré par une Providence lucide.
Une foule de petits espoirs obéissants
Érigent dans mes pensées métamorphosées
Les premières colonnes d'un bonheur renaissant
Et la tombe grise de ton image fanée.
Je l'ôte des mains de Mnémosyne ébahie
En cadeau à la voracité de l'agnosie
Étonnée.
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