Le jour abandonne
lâchement la cité
Sans un regard retourné du soleil,
Le bloc de pierre, de verre et d'acier
Se prépare avec indolence au sommeil.
Point ambulant captif du monde urbain
Enfoui dans l'obscurité qui l'écrase,
Je salis le bitume de mes pas citadins,
Énouant une unique pensée qui l'embrase.
Le visage cyclopéen
de la nuit
Me protège de l'indiscrétion publique,
Il cloître une masse de voisins évanouis
Dans leurs armures lapidaires et pudiques.
Il dégouline lentement de solitude
Sur leurs carreaux éteints et muets,
Leur cache ma nocturne habitude
De marquer les rues pour me libérer.
Je meurtris
mon obsédante pensée
Que je sème sur les trottoirs arides
Dans ma tentative de la distancer
Dans
un viol d'asphalte des rues frigides.
Mais l'oil pâle et froid de l'obscurité
Darde ma solitude d'un coup glacial,
Une lente oillade narquoise et figée
Qui grossit le désarroi qui me hâle.
Cet oil ermite
inexpressif et mort
Excite l'idée implantée qui me ronge,
Il blanchit d'illusions ternes mon sort,
Se transforme en dicteur de mensonges.
D'un pas aveugle je suis les veines citadines
Coincées entre les murs aux milliers d'yeux éteints
Que j'ignore, combattant l'image qui me mine,
Désireuse d'imprimer un souvenir sans fin.
Et j'erre prisonnier,
le cœur sous hypnose,
Dans l'attente que la nuit qui me voit
Pitoyable, m'aspire et me décompose,
Jetant l'idée visage dans l'oubli d'autrefois.
J'attends qu'elle tarisse enfin mon présent,
Achève le meurtre d'un envahissant passé,
Qu'elle m'avorte d'un futur inexistant
Pour m'offrir une parcelle d'éternité.
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